Gensokyo. Lieu : forêt magique. Non loin de la maison de Alice Margatroid. Fin de nuit. Le soleil ne se lèvera que dans quelques heures. Marche à pied. Ennui profond. Aucune arme en main. Pas d'influence notable de la lune. Pulsions meurtrières non assouvies mais absentes.
Absolembum longeait la forêt, sans but. Soudain, il vit Alice Margatroid devant lui.
«…»
-Absolembum? Mais… que fais tu ic…
-…
D'un geste vif et ininterrompu, Absolembum dégaina son épée longue, sur son flanc gauche, et, d'un pas en avant, la planta dans le corps de son interlocutrice.
-Abso… lemb…um… tu me… fais mal…
-La ferme.
Absolembum retira son épée, puis enchaîna encore de deux coups d'épée. La lame fendait le corps comme si elle fendait l'air. Puis il frappa de la paume de sa main gauche. Absolembum vit Alice, à terre, saignant abondamment.
-P-pourqu…quoi? Tu…
-Tu crois pas que ça suffit, là? Arrête de jouer la comédie, c'est trop tard.
-Mais… je ne… comprends pas…
-Tsss… tu persiste? C'est trop tard, je t'ai déjà démasqué.
-De… quoi… parles-tu?
-C'est bon, tu n'as plus besoin de faire semblant, c'est déjà fini.
Nouveau coup d'épée.
-Ab…s…
-Ça, c'est pour avoir tenté de me tuer.
Absolembum planta son épée dans le ventre de la femme en robe bleue.
-Ça, c'est pour avoir cru que ta technique allait fonctionner.
Absolembum frappa à nouveau, à l'épaule cette fois
-Et ça, c'est pour avoir souillé l'apparence d'une amie. Inutilement, qui plus est.
Absolembum planta sa lame entre les deux yeux. Il regardait, impassible, le visage de Alice qui se tordait de douleur, du sang coulant depuis la blessure.
Puis le sang s'arrêta de couler. Le sang disparut. Le corps de la marionnettiste disparut quelques secondes après.
«Idiot. Idiot, idiot, idiot. Tu pensais que j'allais me laisser berner? Je reconnais les démons à des kilomètres. Ah là là, ces démons mineurs…
Je l'avais reconnu dès le début, et pourtant… il continuait à faire semblant.
Je fis le court rituel habituel à la mort de chaque démon que je tue. Je puisais ses dernières traces de Ténèbres afin de l'empêcher de revenir.
…
Je devrais quand même voir Alice. Voir si elle va bien.
Il était encore tôt, mais bon…
Je me dirigeais donc vers la demeure de Alice. La nuit se finissait, et bientôt le soleil allait se lever. Je frappais doucement à la porte ; si elle était déjà debout elle m'entendrait, mais si elle dormait je ne risquerais pas de la réveiller.
Aucune réponse.
Sans plus de formalités j'entrais dans la demeure. Je craignais que le démon qui m'a attaqué lui ai fait du mal. C'était assez peu probable, mais je préférais quand même vérifier.
J'ouvris alors la porte de sa chambre. Je la vis, étendue sur le lit ; ma présence venait de la réveiller. Elle se leva à moitié, se frottant les yeux avec ses poignets. À côté d'elle, sa poupée Shanghai, dans la même position, faisait les mêmes mimiques, et je ne pus m'empêcher de trouver ça vraiment mignon.
Raaaah! qu'est-ce que je dis! Et puis ça ne se fait pas de la regarder comme ça… non, l'important c'est qu'elle n'aie rien, et qu'elle soit en sécurité. Je me décidai donc à repartir.»
-Mhhm… Absolembum? C'est toi? Que fais-tu à cette heure?
-Rien. Désolé de t'avoir réveillée. Je m'en vais.
«Je repartis aussi vite que je suis rentré. Les pensées fusaient dans ma tête. Je devrais peut être rester avec elle… mais non, pourquoi faire? Ah, je devrais plutôt me concentrer sur cette attaque. Un démon est venu. Ici. Au Gensokyo. J'aurais dû le torturer pour le faire parler. Il n'était peut être pas seul… Non, c'est impossible. À cause des nombreuses allées-et-venues des nouveaux habitants au Gensokyo, il y a des failles dans la barrière, et il n'est pas anodin de voir un démon qui s'est engouffré dans une brèche… il est sûrement venu par hasard, en plus.
…
Je longeais la forêt et me dirigeais vers le lac.
Au bout de quelques minutes de marche je me rendis compte que j'étais suivi. C'était Alice. Elle est partie me voir, sûrement déboussolée par ma venue soudaine.
Alice est vraiment une fille géniale. Elle est gentille, et même si elle n'arrive pas à me comprendre – il faut dire que je n'arrive pas moi-même à me comprendre – elle fait tout son possible pour m'aider à me sentir mieux.
Oui, je devrais aller lui parler. Je pourrais me retourner et l'attendre… seulement… à quoi cela servirait?
Pour l'instant, à vrai dire, je pensais au démon. En fait… je crois que l'avoir tué a réveillé mes pulsions meurtrières… combien de temps déjà n'ai-je pas tué? Le démon mineur ne m'a pas rassasié, il a fait que nourrir mon appétit. Il faut que je sorte, que je me batte.
J'arrivais près du lac. Je me posa près du rebord, et plongea ma tête dans l'eau, pour m'éclaircir les idées.
Est-ce que je devrais parler avec Alice? Le matin s'est levé, je pourrais très bien discuter avec elle jusqu'au midi… oui, c'est vrai que l'idée me tentait bien, mais… il y a ce je-ne-sais-quoi qui m'incite à ne pas le faire… je veut me battre, j'ai soif de sang.
Après tout, j'ai toujours vécu ainsi… toute ma vie, je me suis battu, affronté des démons, tué des meurtriers… pourquoi s'arrêter?
… Non, je ne pourrais jamais m'arrêter. Je suis… né pour le combat. Tout ce que sais faire, tout mon art, toute ma vie, c'est semer la mort. Je suis incapable de rester avec Alice et m'amuser avec elle. Je suis… un monstre. Je ne peut pas vivre avec elle.
Je remontais ma tête, pris à court d'oxygène. L'eau me coulait le long du visage, et à ce moment précis je ne sus discerner si cette eau contenait des larmes ou non. J'entendais les bruits de pas de plus en plus distinctement. Alice se tenait quelques mètres derrière moi.
Je veut tuer. Je dois tuer. Je… ne peut que tuer. Le reste n'est pas dans mes capacités…»
-Absolembum… ça va?
-… Pars.
-Comment? Mais… pourquoi?
«Elle s'approcha de moi. Plus elle était proche de moi plus je sentais mon corps frémir. Je n'arrivais pas à décrire ça, mais… ce n'était pas quelque chose d'agréable. Elle posa sa main sur mon épaule. Je réprimais mon envie de réagir. Ce contact était si étranger… je ne me sentais pas bien du tout.»
-Je suis désolé, Alice. Je ne peut pas rester. Je ne peut pas… rester avec toi. Je suis vraiment désolé.
-Absolembum… je ne sais pas ce que tu as, mais tu peut toujours te confier à moi. Je sais que tu n'es pas habitué à être près de quelqu'un, et que cela te rebute un peu, mais tu te sentiras mieux après, j'en suis sûre! Ne t'enferme pas dans ta solitude, tu…
-Non… je… Alice, s'il te plaît, vas t-en. Je suis… dangereux.
-Je ne te crois pas. Tu peut te montrer agressif, mais au fond de toi tu es sensible, gentil… je veux t'aider à ce que tu te sente mieux.
«Alice s'approcha plus près, et me pris le bras. Dans un mouvement de rage, je la repoussai. Elle tomba au sol.
Je n'arrivais pas à me calmer. Sa présence me faisais ressentir quelque chose, que je n'arrivais pas à expliquer, et je n'avais qu'une seule envie : m'en débarrasser. Pourtant je regrettais mon geste sitôt avoir bousculé Alice. Je ne pourrais pas vivre avec elle… je ne pourrais même pas rester quelques instants. Il fallait que je parte. Il fallait que je fasse ce que je fais depuis toujours. Il fallait que je me batte.
…
Je suis horrible. Je suis un monstre. Je n'ai même pas accès au bonheur. Peut être que… je ne le mérite pas.
Je continuais à m'éloigner, ignorant les appels de mon amie marionnettiste. Je devais partir.
…
Cette fois-ci, j'étais presque sûr que ce n'était pas l'eau du lac qui coulaient le long de mes joues. Je veut être avec elle. Je veut être heureux. Je n'ai jamais eu le choix. Je ne peut pas changer… c'est trop tard maintenant.
J'étais parcouru par un sentiment d'impuissance lorsque je me rendis dans un coin de la forêt. Là, derrière ces arbres, était caché un sceau un peu spécial que j'avais créé il y a quelques temps avec l'aide de Yukari, et qui me permettait de me téléporter hors du Gensokyo.
J'avais envie de me changer les idées. Aussi ai-je décidé de retourner à mon monde d'origine. Je pourrais revoir les membres de mon ancienne compagnie… c'est vrai que je me suis toujours demandé ce qu'ils faisaient.
…
Une fois le sceau activé, une lumière m'éblouit. Il faisais déjà jour, de l'Autre Côté. Je ne m'attardais pas longtemps et préparais un nouveau sceau pour changer de monde. Je me retrouvais rapidement dans un décor tout autre. Ici aussi, le matin s'était déjà levé et le soleil commençait à grimper le long du grand ciel dégagé. Malgré le fait que je ne sois pas venu depuis longtemps, je me souvins presque instantanément la direction à prendre pour atteindre Suracar, la plus grande ville du continent. Une ville que j'ai énormément fréquentée, du temps ou je vivais en ce monde. Je savais que, quelques temps après que moi et le reste de mon équipe nous soyons séparés, deux membres de cette compagnie sont restés en cette grande ville. L'envie me prenait d'aller les revoir.
Une fois en ville, je reconnus toutes les rues, les bâtiments. Tout avait plus ou moins changé, mais je me souvenais de ce qu'il y avait avant, comme si j'y étais resté toute ma vie. Je traversais la grande rue principale, puis tournai à un endroit précis. une grande taverne, dont l'enseigne, usée par le temps, n'avais jamais semblé aussi resplendissante à mes yeux.
"Taverne du commanditaire"
Cet endroit rassemblait tout les mercenaires, guerriers en quête d'aventure, ou riches personnes ayant des quêtes à proposer à qui le voudra de la région. Je suis allé à cet endroit nombre de fois. Dedans y respirait une atmosphère particulière, que j'apprécias tant. Nombre de personnes douées pour le combat s'y trouvait, et pourtant il n'y avait jamais de batailles de taverne entre hommes bourrés qui s'énervaient pour un rien, ce qui est admirable pour une taverne aussi grande. Après avoir longé du regard le bâtiment de l'intérieur, je me dirigeais vers le comptoir.»
-Allons bon! Mais c'est Absolembum, le chef de la Compagnie des Sinistrés!
«Ouais, c'est vrai que c'était le nom que nous avions donné à la compagnie, à l'époque… mais… je ne connaissais pas le dirigeant de la taverne, et cela fait des années que je ne suis pas venu… comment m'a t-il reconnu?»
-Euh, oui, c'est moi, mais… comment le savez-vous?
-Allons, vous êtes la compagnie la plus prisée de tout le continent! et la fierté de la ville! Allez, je vous offre un coup à boire!
-Non, merci, c'est trop… mais… j'ai une question : Est-ce que Wyren et Ezoq vivent toujours ici?
-Ah ah ah! Bien sûr, évidemment! Ce sont les héros de la ville, Sieur Absolembum! Allez donc les voir, ça leur fera plaisir!
-Il en encore tôt, je devrais attendre avant de les…
-Ah, vu l'heure qu'il est, la troupe va pas tarder à venir, ils doivent donc être réveillés depuis pas mal de temps déjà!
-La troupe? Que…
«Je n'eus pas le temps de finir ma phrase que le tenancier de la taverne me pressa vers la sortie. Je remarquais alors que tout les regards étaient rivés sur moi… ah, je n'avais pas idée de la réputation qui m'a suivie toutes ces années!
Je partis donc, en direction d'un des plus grands bâtiments de la ville – le seul aussi, qui est d'un blanc immaculé. L'auberge la plus luxueuse de la région… c'est vrai que cette ville avait de quoi attirer, quand même. À mon souvenir, mes deux anciens alliés, Wyren, la barbare érudite et Ezoq, le mage mi ange mi démon, sont revenus à Suracar et vivent désormais dans cette auberge.
Le temps que j'y aille, je remarquais que les rues se vidaient ; les habitants, un à un, se poussaient pour dégager la rue… cela ne présageait pas une grande nouvelle. Puis, lorsque que j'atteignis la porte de l'auberge, je vis deux êtres sortir. La première, une grande femme blonde, à la carrure d'athlète, et aux habits colorés, cousus en une harmonie entre tissus raffinés et peau de bête. Pas de doute, c'était bien Wyren. L'autre, un homme aux cheveux noirs et blancs, aux yeux bleu clair légèrement inexpressifs, habillé d'une toge peu amble et d'un pantalon de tissu, le tout noir et blanc. Ezoq. Je fus surpris de les voir ainsi, Ezoq semblait à moitié endormi, et Wyren était totalement différente de lorsque que je l'avais connue : ses longs cheveux blonds attachés en une queue de cheval, et des petites lunettes qui mettaient en valeur ses yeux bleus. Elle tenait dans une main un livre épais, et de l'autre elle tenait une longue sacoche qui passait par son épaule et descendait jusqu'à ses pieds. Elle était habillée en une sorte de jupe longue, contrairement à d'habitude. La voir ainsi me fit remarquer qu'elle était particulièrement jolie… quand elle n'était pas armée de sa gigantesque épée.»
-Wyren! Ezoq! Je venais justement vous voir!
-Absolembum?! Eh, ça faisais longtemps! tu aurais pu passer donner des nouvelles!
-Absolembum, désolée, mais nous n'avons pas le temps… nous pourrons discuter plus amplement après, mais pour l'instant, nous allons nous battre!
«À ces mots, la barbare érudite rangea son livre et ses lunettes dans sa sacoche, et détacha ses cheveux. Elle détacha sa jupe, puis je me rendis compte que son vêtement était prévu pour être modifié. Elle raccrocha le bout de tissu qu'elle avait, et en quelques secondes sa longue jupe devint une sorte de pantalon court adapté pour de grands mouvements rapides. Elle sortit ensuite de sa sacoche son épée. En l'espace de quelques secondes je pus enfin la voir telle qu'elle était dans mes souvenirs. Ezoq, lui, ne se prépara pas tant, et sortit juste de sa toge un petit sceptre de la taille de l'avant-bras.
Je fus tellement abasourdi par les voir se préparer à se battre que je me tournais instinctivement vers la rue vide. Je vis alors une armée d'une petite centaine de soldats, tous vêtus d'un uniforme militaire rouge bordeaux, et tous armés d'une épée à la ceinture et d'une hallebarde à la main.»
-C'est pas bon ça… vous m'expliquez?
-Bah, ils viennent souvent. Les matins, cinq fois par semaine, ils viennent. Ils cherchent à détruire le village, mais nous les faisons battre en retraite à chaque fois.
-Si tu veut, Absolembum, tu peut te battre avec nous.
-Je ne comptais même pas vous demander tellement c'était évident!
«Ma phrase les fit décrocher un sourire. Je m'avançais alors, dégainant ma faux. C'était parfait. C'était exactement ce que je voulais : une armée à maîtriser.
Avant que l'armée ne soit proche de nous, je fonçais vers eux, le regard ferme et décidé. Le premier soldat hurla mon nom, visiblement peu content de me reconnaître. Plus aucun des soldats ne bougea, sans savoir que faire face à un tel danger. Je ne leur laissais pas le temps de réflexion et frappa le premier soldat d'un coup vertical, de l'estomac jusqu'au menton. Une gerbe de sang coula, et je ne pris pas le temps de me laisser arroser que je pris le soldat devant moi de la main gauche, et je lui trancha la tête d'un coup rapide. Les autres soldats sortirent leurs armes, mais un éclair frappa un petit groupe, les brûlant à la tête et en tuant certains. J'aperçut Wyren, son épée double dans mes mains, frapper deux gardes au ventre en un grand moulinet, faisant tomber leurs organes au sol.»
-ABSO! PRENDS TES ÉPÉES! TU FONCE DEVANT EN PERCANT LEUR FORMATION, ET JE TE SUIS EN TUANT LES GARDES PROCHES! EZOQ, TU ATTAQUE LES SOLDATS SUR LES CÔTÉS AVEC TES SORTS! T'inquiète pas Abso, je couvre tes arrières, et Ezoq les miens!
«Je me suis toujours dit que Wyren était incroyablement intelligente, et que je devais me fier aveuglément à ça. Finalement, même si sa stratégie semblait simpliste, c'était la meilleure des choses à faire. Étant rapide et vif, je pouvais, avec mes deux lames courtes, foncer dans la formation en tuant tout ceux devant moi. Cela créera une longue brèche dans laquelle Wyren passera, et pourra alors attaquer sur une vaste zone grâce à sa grande épée. Ezoq, qui était encore posté à l'entrée de l'auberge, lançait des sorts de très loin. Il ne pouvais pas se faire attaquer vu la distance, et pouvait donc en profiter pour blesser tout les soldats qui n'ont pas étés frappés, autrement dit ceux qui se trouvaient aux extrémités de la formation. Ainsi, les aptitudes de chacun d'entre nous trois était utilisée à bien, et chacun pouvais compter sur un autre en cas de souci.
Je me sentais en sécurité absolue en suivant son plan. C'est donc le cœur léger que je sortit mes deux lames courtes et que j'en plantai une dans le cœur de l'ennemi d'en face. Je poussai son cadavre du pied pour le faire tomber et retirer ma lame, puis je frappai encore en avançant. Je tranchai le bras et le cou du suivant, puis vit volte-face pour planter mes lames derrière moi, feintant pour éviter que le garde ne se protège – et jeter un œil sur Wyren et Ezoq. Je me retournai brièvement, ouvrant les poumons d'un garde du même coup, puis je plantai ma lame dans la gorge du garde devant moi. J'entendais les gardes agoniser dans un bruit guttural ou dans des grands cris de souffrances précédés par une déflagration de flammes ou de foudre. Ces bruits, le fait de voir ces hommes tomber devant moi… je trouvais ça jouissif.
Je plantai ma lame dans l'œil du garde, la faisant ressortir de l'autre côté du crâne, puis je me rendis compte que j'avais traversé toute la formation ennemie. La tactique fonctionnait bien, toutes les troupes étaient éparpillées de partout, dans un chaos indiscernable. L'ordre impassible de l'armée ayant totalement été anéanti, il était désormais simple de tuer les gardes en masse via des sorts ou une épée double ; les soldats ne cherchaient presque plus à se défendre de toute façon. Je pris donc l'initiative de sortir à nouveau mon arme de prédilection pour aider mes compagnons à tuer. Au bout de quelques minutes le but n'était plus de vaincre une petite armée mais d'achever les survivants. Enfin, nous stoppions le combat.
Je devais être le seul à rire à gorge déployée, mes lames et mes habits maculés de sang.
Nous traversions les corps, à la recherche d'un survivant à achever.»
-NAAAN! PITIÉ! PITIÉ!
«C'était un jeune soldat. Il n'a été touché que par un sort du mage aux cheveux noirs et blancs, son épaule était en sang.»
-S'il vous plaît, pitié! je vous en supplie, épargnez moi! waaahaaaaah!
«Il pleurait.»
-Wyren… je l'achève?
-Il vaudrait mieux.
-Ah…aaaaah… pitié!
-Le pauvre… j'ai de la peine pour lui, tiens.
-Toi? ça me surprend venant de ta part.
-Dis moi, soldat. Comment es-tu arrivé à l'armée? on t'a recruté ou tu es venu de ton plein gré?
-J'y suis allé moi même… pitié! je… voulais… snlrf… avoir de l'argent… je ne pensais pas que je devrais…
-Te battre? Mourir au combat?
-hggn… ha… ha…
-Tu es très blessé, là. Je peut t'offrir une mort rapide.
-Non! non! pitié! Je ne veut pas mour*slarch*
«Wyren l'a décapité. Je n'aurais pas versé de larme pour lui, mais tout de même, le pauvre… bah, je l'aurais probablement tué aussi, de toutes façons.
Nous nous dirigeâmes vers l'auberge, tandis que notre mage hybride brûlait les corps. Ce combat m'avait certes fatigué, mais beaucoup reposé mentalement. Je me sentais mieux. Je me sentais… vivant. Keh, douce ironie qu'est ma conception du bonheur… tssss.
Les habitants nous acclamaient… nous venions à l'instant de sauver la ville, en fait. Le dirigeant de l'auberge vint pour nous remercier, et offrit une nuit gratuite pour mes deux compagnons ; je savais qu'avant, ils devaient parfois partager une chambre car ils ne pouvaient pas avoir une chambre séparée, et pourtant maintenant ils avaient régulièrement des nuis gratuites à l'auberge. Je comprenais mieux pourquoi ils ne quittaient pas Suracar.»
-Dites… qui sont ils, pourquoi ils attaquent la ville?
-Pour l'annexer. Ils envoient chaque jour des troupes pour prendre possession de la ville. Mais, sachant que nous sommes là, ils envoient d'abord des troupes pour nous tuer… toutes les trois-quatre défaites environ, ils envoient plus d'hommes… dans le pire des cas nous pouvons encore compter sur l'armée de la ville, sur les villageois eux-mêmes… imagine si tout les guerriers de la taverne du commanditaire nous aidaient! Ils finirons par être à court d'hommes, et abandonner l'idée de prendre la ville d'assaut. J'ai vérifié très longuement toutes les différentes possibilités d'attaques, aucune n'a de chance de marcher, tant que nous serons là pour protéger la ville. Leurs assauts sont vains, et ils doivent le savoir. Tout ce dont nous avons à faire est d'attendre qu'ils abandonnent.
-Je vois… je vous souhaite bonne chance pour la suite, alors. J'ai été très content de vous voir, mais je vais vous laisser maintenant. Le combat m'a remis les idées en place!
-Allez Absol', on se reverra!
«Je fis un dernier au-revoir à mes deux amis avant de matérialiser un sceau à même le mur, pour retourner au Gensokyo.
En partant je me suis mis à réfléchir. En fait, c'est vrai que, malgré le fait que ma vie soit à la fois dangereuse, horrible, et que je n'ai jamais eu le choix de la vivre… il faut reconnaître que je me plaisais à tuer. Et puis, penser à ce que serait ma vie si ça ne s'était jamais produit… je ne pourrais pas l'imaginer. Non, en fait, cette vie me plaît. Elle me fait souffrir, me ronge de l'intérieur, mais je ne pourrais pas vivre sans.
… Je devrais quand même aller m'excuser auprès d'Alice, après ce que je lui ai fait… elle mérite bien une petite explication.
Je me dirigeais vers le lac, où je l'ai quittée. La connaissant, elle est restée ici à m'attendre. …Tout de même, je compatis pour elle… elle essaye de m'aider, et je ne lui rends pas la vie facile…
Comme je l'avais deviné, je vis Alice assise sur le bord du lac, contemplant les légères ondulations de l'eau se mouvant au contact de la brise… je ne pus m'empêcher de sourire en la voyant.»
-Alice, je suis revenu. Je m'excuse pour tout à l'heure, je suis sincèrement désolé.
-Que s'est-il passé, pourquoi tu es parti? j'étais inquiète!
«Je ne pus discerner si elle était inquiète ou en colère contre moi.»
-Écoute, je…
«Je décidais de m'asseoir à côté d'elle, les genoux contre ma poitrine, en contemplant la surface de l'eau. Mon épaule droite touchait la sienne.»
-Je me suis rendu compte que je voulais vivre comme… comme tout le monde, quoi. Être avec des gens que j'aime, qui m'aiment, m'amuser… je sais pas moi, faire comme les autres, tomber amoureux, jouer avec les autres, enfin des trucs comme ça quoi… seulement… je peut pas. Je ne sais pas comment vivre comme ça… d'ailleurs, je me suis rendu compte qu'en fait, la vie que je mène me plaît. Je ne peut pas vivre sans tuer… et pourtant, je désire autre chose.
-Absolembum. Tu peut très bien vivre comme tu le souhaite, tu sais.
-Je ne vis que pour tuer. Comment tu veut que je change ça?
-Tu peut très bien rester avec des gens que tu aime bien entre deux combats, pour te détendre, pour… être heureux.
-…
«Oui, mais… je ne sais pas comment faire. Je n'ai jamais vécu comme ça… peut être qu'en fait, je ne suis pas capable de vivre comme les autres, que je ne le mérite pas?»
-Abso, tu pense trop fort, je peut presque deviner tes pensées. Quoi que tu pense, sache que personne ici ne te considère comme un monstre, ou une personne horrible… tu es comme les autres. Je te côtoie alors que tu es un humain et je suis youkai. Mais quelle différence ça fait? Tout le monde t'accepte tel que tu es.
-Mais…
-Ne dit rien.
«Elle posa le plat de sa main sur ma bouche pour m'intimer le silence. Elle ne voulait pas que je continue. Je me sentais rouge de honte et de colère contre moi même… j'avais réussi à me plomber ma bonne humeur…»
-Tu réfléchis trop. Essaye d'être plus spontané, tout ira mieux!
«Elle avait raison. Plus je réfléchissais, plus je m'embrouillait, et plus je perdais mon moral… c'est vrai que si je m'éclate tant dans les combats, c'est parce que je me vide la tête… mais là, impossible de me stopper, je dois agir pour ne plus penser… il faut que je m'occupe l'esprit.
Je posais ma main sur l'épaule droite d'Alice, et lui pris sa main gauche pour l'aider à se relever.»
-Il fais frais. Rentrons.
-Tu viens chez moi?
-Non, je pars au Manoir des Scarlet. Je vais bouquiner un peu à Voile.
«Je me levais en même temps qu'elle, puis la couvrit de mes bras. Nous longeâmes la bordure du lac. Nos chemins se séparèrent, nous nous dîmes au revoir avant de partir chacun de notre côté.»
Je ne sais plus ce qu'il s'est passé à ce moment là, mais je suis certain que nous avons passés une dizaine de minutes avant de se quitter… et pas le moindre souvenir de ce que nous avons fait à ce moment là…